Les Indigents

Les actions de nos municipalités en faveur des indigents au début du XIXe siècle :

1) L’enseignement, les bureaux de bienfaisance, les ateliers de charité. Dès 1816, 1817, on trouve la trace, dans les délibérations des conseils municipaux de nos communes, des mesures prises pour venir en aide aux indigents.

• Mais revenons d’abord en arrière pour connaître le contexte.

Dans l’Antiquité, l’assistance était perçue comme une obligation morale. Dans Deutéronome 15, Moïse déclare notamment : « Il y aura toujours des indigents dans le pays, c’est pourquoi je te donne ce commandement : tu ouvriras ta main à ton frère, au pauvre et à l’indigent dans ton pays. »

Au Moyen-Âge, l’assistance était du ressort de l’initiative privée (en particulier l’église et les établissements hospitaliers), et au XVIe siècle, ce sont les communes qui se sont vues confier le soin d’assister les pauvres et les mendiants. La lutte contre la mendicité qui se développe, pousse le pouvoir royal à faire prendre en charge par l’État la gestion de la pauvreté et l’emploi de pauvres à des ouvrages de voirie remonte à cette époque : c’est alors une peine qui réprime l’oisiveté. L’idée de regrouper les indigents dans des ateliers de charité ou des maisons du travail est reprise sous le règne de Louis XIV, et plus encore dans la seconde moitié du XVIIIe siècle (étendue à la province). 

Les ateliers de charité, qui reposent sur des travaux d’intérêt général confiés aux plus défavorisés, répondent par la suite au souci d’assister par le travail et de fournir un salaire plus qu’une aumône (à l’inverse, la mendicité est réprimée). En effet, cette conception de l’aide aux pauvres valides (qui s’intègre dans une action sociale obligatoire) est reprise à la Révolution ou elle se concrétise réellement dans l’idée d’une action sociale obligatoire.

C’est en 1796 (loi du 7 Frimaire an V), sous le Directoire, que sont créés le droit des pauvres et les ateliers de bienfaisance. Une taxe est alors instituée sur les spectacles afin de permettre de trouver des ressources pour les bureaux de bienfaisance chargés de percevoir et d’organiser les secours à domicile et l’ensemble des aides comme la soupe populaire, l’instruction et le suivi des dossiers de secours, les bons de nourriture, les bons de charbon, etc. Une loi de 1797 les étendra à la province, mais la gestion directe par les communes, sous tutelle du canton, date de 1801.(1)

 • À Cheverny
  • Une délibération du Conseil municipal de Cheverny du 13 janvier 1817 mentionne que l’institutrice (de Cour-Cheverny) recevra de la commune une somme de 60 francs en rémunération des cours « donnés (gratuitement) aux enfants de la classe indigente de Cheverny ». (cette exigence de fournir un enseignement gratuit pour ces enfants était récente puisque édictée par une ordonnance du roi du 29 février 1816).
  • Dans une délibération du 18 mai 1817, le même Conseil municipal, à l’occasion de l’examen des comptes de l’année 1816 et du budget de 1818, fixe les conditions du financement des secours octroyés aux indigents.
  • Dans une autre délibération du 14 novembre 1817, le conseil décide «la reconduction de l’atelier de charité, ouvert en 1816, pour occuper les indigents l’hiver».
  •  Seuls les indigents valides se livraient à des travaux d’intérêt général pénibles. D’après le baron Favard de Langlade (1), ces ateliers se développèrent surtout après 1816 (ce qui peut expliquer l’ouverture d’un atelier à Cheverny cette même année).

2)     Le grappillage, le glanage et le ratelage
Délibération du Conseil Municipal
de Cour-Cheverny - 
19 octobre 1837

• À Cour-Cheverny : autre contexte, autre délibération…

Le grappillage, au même titre que le glanage et le râtelage, était un droit coutumier au Au Moyen-Âge, et il fut reconnu par la loi (l’art. 21 de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, par exemple, entérine ce droit dans les lieux où l’usage était reçu). Cependant, seuls les pauvres de la commune pouvaient en bénéficier et les dates étaient généralement fixées par le Conseil municipal (voir La Grenouille n°18).

Une délibération du Conseil municipal du 19 octobre 1837, se réfère dans son préambule à la loi du 6 octobre 1791 et aussi (surprenant pour l’époque) à une ordonnance d’Henri II du 2 novembre 1554 qui « interdit le glanage et le grappillage à tous autres qu’aux gens vieux et débilités de membres, aux petits infans et autres gens qui n’ont pouvoir ni force sous peine d’être punis comme larrons ». Le conseil arrête : « qu’il tiendra la main pour empêcher autant que possible que des gens forts et robustes et se trouvant au dessus du besoin aillent grappiller et ravir les ressources accordées aux malheureux ...» et encore : (pour éviter le commerce auquel se livrent certaines personnes n’habitant pas le commune), « ...tout étranger à la commune qui sera trouvé sans certificat d’indigence sera arrêté et poursuivi municipalement... »

(1)    Répertoire de la nouvelle législation civile, commerciale et administrative – G. Favard de Langlade.

 Le Héron  - La Grenouille n°26 – Janvier 2015

  

Le premier 14 Juillet à Cour-Cheverny et Cheverny

Extrait du recueil des délibérations 
du Conseil Municipal de 
Cour-Cheverny de l'année 1790
En compulsant le recueil des délibérations du Conseil municipal de Cour-Cheverny de l’année 1790, soit l’année qui a suivi la Révolution Française, j’ai trouvé deux délibérations dédiées à cette fête du 14 juillet.
Croyant, comme la plupart d’entre nous, que le 14 juillet était jour de fête nationale depuis 1880 et commémorait la prise de la Bastille à Paris en 1789, je fus surprise d’appendre qu’une célébration était déjà prévue, ce jour là, en 1790. Je chargeai donc mon ami le Héron, toujours dévoué, de me renseigner.

Les archives de Cheverny

Subodorant l’existence de trésors pour mes recherches sur l’histoire de nos communes, j’ai demandé à mon amie la souris, qui connaît bien les lieux, de me faire visiter le grenier de la mairie de Cheverny. 


Je ne fus pas déçue et j’ai maintenant plein de nouvelles histoires à vous raconter, insolites parfois, pour nous qui vivons maintenant dans le troisième millénaire, mais historiques surtout et pleines de renseignements sur la vie des habitants de nos villages depuis la période post-révolutionnaire jusqu’à la première moitié du 20ème siècle. Je vous propose donc, aujourd’hui, de remonter le temps et de nous transporter 200 ans en arrière.


Vendanges en Sologne
Au début du 19ème siècle, les dates des vendanges sont fixées par le conseil municipal. C’est ainsi que par délibération en date du 10 octobre 1813, l’ouverture des vendanges est fixée « au 11 courant pour les petits particuliers et au 14 suivant pour les autres propriétaires de vignes ». Par délibération du 24 octobre 1813 le « grappillage » est autorisé en ces termes : « Après avoir consulté les principaux propriétaires de cette commune et nous étant assuré que les vendanges étaient terminées, avons arrêté que le droit de grappiller est accordé pour le 25 octobre ». 


Autre domaine : celui des finances communales (vaste sujet) et la rémunération du garde champêtre. Si l’institution remonte au Moyen-Âge, le garde-champêtre est rendu obligatoire dans chaque commune par la loi du 20 messidor an III (8 juillet 1795). Son rôle principal est de veiller à l’intégrité des propriétés rurales et des récoltes. Il représente la Loi qu’il faut à la fois transmettre et faire respecter. La loi pour le cas ou les communes n’ont pas de revenus suffisants pour certaines dépenses néanmoins obligatoires ou nécessaires, les autorise à lever un impôt extraordinaire. C’est ainsi que par délibérations des 13 et 19 février 1817, le conseil municipal de Cheverny, fixe à 250 francs la rémunération de son garde champêtre et, constatant que la commune ne dispose pas de fonds suffisants, demande au préfet d’approuver la levée d’un impôt extraordinaire sous forme de centimes additionnels à l’impôt foncier, contribution supplémentaire à laquelle seules les propriétés non closes sont soumises (en 1832, dans le cadre d’une réforme de la fiscalité foncière, toutes les propriétés y seront soumises). 

Pour terminer cet épisode, revenons à l’Histoire de France (avec un grand H) : le 6 avril 1814, le Sénat (seul corps législatif encore existant), qui a voté la déchéance de Napoléon 1er le 4, adopte une nouvelle Constitution et proclame Louis XVIII « Roi des Français ». Par délibération du 9 avril 1814, le conseil municipal de Cheverny vote son adhésion aux actes du gouvernement provisoire du Sénat ; le texte de la délibération précise : «L’adresse d’adhésion sera adressée sur le champ à monsieur le préfet du département pour la transmettre au gouvernement provisoire ».

À suivre...
Le Héron - La Grenouille n° 18 - Janvier 2013